Le voyage de Jeanne

Découvrir le monde au gré des vents avec son compagnon est le rêve de nombreuses jeunes femmes. Beaucoup y pensent, peu le réalisent. Les obstacles sont nombreux, matériels comme sociétaux. Pour réussir il faut avoir du caractère, être réfléchie, intrépide mais non téméraire. Le projet doit être mûri avant le départ et chaque étape nécessite une analyse de la situation et une évaluation des risques avant de l’engager. Enfin, un tel voyage ne peut pas être une simple croisière touristique, il faut qu’il ait une finalité enrichissante pour la voyageuse.

Réaliser un tel projet au XVIIIème siècle relevait de l’impossible. La condition des femmes à l’époque n’était pas celle d’aujourd’hui. Elles n’étaient pas admises à bord des vaisseaux du Roi et en 1765 Jeanne Barret dût se travestir en garçon pour accompagner Philibert Commerson, naturaliste du voyage de découverte de Bougainville.

Rapidement le doute sur le sexe du valet se répandit dans les équipages, Jean/Jeanne dût faire appel à de multiples stratagèmes pour déjouer la curiosité des hommes. Les tahitiens ne s’y trompèrent pas et la reconnurent comme femme dès qu’ils la virent. Bougainville et ses officiers ne voulaient pas de scandale et le firent comprendre aux matelots. Mais un jour où elle faisait la lessive dans un lieu reculé, elle fut violée par quelques fortes têtes. Elle ne se plaignit pas, mais les auteurs se vantèrent et Bougainville l’appela, ostensiblement, Dame Barret. Philibert Commerson et son valet, qui était aussi sa collaboratrice – elle herborisait et classait les herbiers – et sa compagne – ils avaient eu un enfant ensemble – débarquèrent à l’ile de France où ils furent accueillis par Pierre Poivre. Bientôt ils se séparèrent, Commerson mourut sur place et Jeanne se maria et rentra en France. L’aventure connut son épilogue en 1785, lorsque le Roi Louis XVI, sur la recommandation de Bougainville, accorda une pension à Jeanne Barret qu’il qualifia de « femme extraordinaire ».

Jeanne Barret n’a laissé aucun journal de voyage, mais Anne-Catherine Blanc a donné corps à une ombre et en a créé un à partir d’au moins cinq récits rédigés par des membres de l’expédition. Les pensées qu’elle prête à son héroïne sont sans doute très éloignées de celles de Jeanne, mais le résultat est un journal qui respecte les évènements consignés par les uns ou les autres, bien plus agréable à lire que la sèche formulation des documents originaux. 

Le patrouilleur des Affaires Maritimes PM43, entré en service en 2022,  porte le nom de Jeanne Barret.

CV(H) Gérald BONNIER
07/01/2024

Le voyage de Jeanne
Anne-Catherine Blanc
Préface de Titouan Lamazou
Editions des Instants

Retrouvez également la vie de Jeanne Barret dans l’Aventurière de l’Etoile, de Christel Mouchard.

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