Pour mourir, le Monde

Ce livre a reçu le Prix Marine Bravo Zulu 2023 dans la catégorie « Livre ».

Le début du XVIème siècle voit l’Europe en pleine tourmente, la Guerre politico-religieuse de Trente ans bat son plein, la Guerre de Quatre-Vingt ans commencée en 1568 reprend de plus belle en 1621, les alliances se font et se défont comme vire le vent, la cruauté est partout et les conditions de vie ne sont guère enviables.

C’est avec cette instabilité en toile de fond que l’auteur, historien et féru de civilisation occitane, nous raconte le destin tragique de ses personnages de fiction, néanmoins très proches des hommes et des femmes de l’époque. Avec un talent de conteur indéniable, une écriture maitrisée, un sens des mises-en-scène et une grande connaissance du monde marin de l’époque, Yan Lespoux nous entraîne dans une aventure souvent dantesque, à la suite de trois personnages que rien ne prédestinait à se rencontrer sinon la violence des tempêtes qui au gré de leurs vagues énormes ont chahuté leurs destins.

Fernando Teixeira, jeune portugais malmené de partout et de surcroît mal-aimé par son père s’embarque avec son ami Simaõ Couto sur le Saõ Juliaõ, grosse caraque en partance pour l’Inde, chargée de soldats pour y défendre les possessions portugaises, de marchands et de leurs marchandises, sans oublier les prêtres pour le salut des âmes qui se trouvaient à bord. Le navire flanqué de deux autres caravelles, est commandé par Dom Manuel de Meneses. L’Anglais rôde, l’inévitable bataille navale est engagée dont le Saõ Juliaõ sort une première fois vainqueur avant de couler au large de la Grande Comore. Les survivants rejoignent finalement Goa et nos deux marins novices se retrouvent au service d’Adil Shahi, souverain du Sultanat de Bijapur, célèbre pour ses diamants.

Pendant ce temps, les Hollandais prennent Saõ Salvador de Bahia aux portugais. Les scènes d’horreur sont légion et le jeune Diogo Silva qui a vu ses parents brûler avec leur maison, fuit en forêt chez les Tupinambas. Il se lie d’amitié avec Ignacio, indien de son âge, embrigadé par la Compagnie de Jesus. Entretemps, l’armada dépêchée par Madrid arrive pour délivrer Bahia avec l’appui des Jésuites retranchés dans la forêt. Le Commandant en chef de la flotte portugaise n’est autre que Dom Manuel de Meneses ….

Le long des côtes du Médoc les naufrageurs guettent les navires en péril et c’est chez ces hommes rudes et cruels que se réfugie la jolie Marie après avoir laissé pour mort un client un peu trop entreprenant dans le bordel bordelais où elle faisait des passes.

 Quelques tempêtes de plus et le sang coulera à nouveau sur le sable blond planté de résineux. Le décor est planté, les héros sont ballotés de leur lieu de naissance jusqu’à leur mort quelque part en ce monde d’où le titre de l’ouvrage emprunté au grand écrivain baroque portugais Antonio Vieira, qui sera présent lors des débats préparatoires la paix de Westphalie mettant pour un temps fin à ces guerres meurtrières. Les parcours de vie de nos héros rencontrent les mêmes embûches faites de la noirceur des âmes et des évènements qui les entourent. Ils seront eux aussi sans pitié car la survie est à ce prix. L’esclavage, l’Inquisition, la chasse aux juifs, l’absence de droits humains des peuples indigènes, la défense des intérêts égoïstes, privés et ceux des Etats en formation, traversent ce roman épique, héroïque, poétique et qui nous laisse le souffle court au bord d’une plage bordée de dunes où viennent mourir ceux dont la mer ne veut plus. A lire assurément – quelle belle trame pour des films d’aventures !!

CF(H) Alain M. BRIERE
08/08/2023

Pour mourir, le Monde
Yan Lespoux
Agullo Éditions

Voir également les récensions du LV(H) Bruno LEUBA, du LV(H) Dominique RENIE, du CF(H) Philippe BEAUCHESNE et du CC(R) Jean-Pascal DANNAUD

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