Le mystère de l’île aux cochons

Ce livre a reçu le Prix Marine Bravo Zulu 2022 dans la catégorie « Livre ».

Fascinant ! L’archipel des îles Crozet, où se situe cette Île aux Cochons, fait partie de ces possessions subantarctiques qui donnent à la France une grande partie de son domaine maritime. L’aridité, un climat détestable, une mer déchaînée en permanence, des approches peu sûres et qui ont mis deux siècles à être à peu près connues puis le pétrole et la fin de l’exploitation de l’huile de baleine et d’éléphant de mer comme l’arrêt de la chasse au phoque et à l’otarie ont assuré à quasiment toutes ces îles, hormis la base scientifique des Kerguelen, une certaine protection contre l’activité humaine et un développement presque harmonieux de la faune et de la flore endémiques.

Michel Izard, grand reporter à TF1, passionné par les pôles, assisté de Bertrand Lachat, cameraman et photographe, a été intégré à l’équipe scientifique qui, en 2019, fut débarquée sur l’île aux Cochons pour une étude limitée à cinq jours dans la recherche de la solution de l’énigme qui donne son titre à ce livre. Lors de la dernière expédition scientifique sur cette île, en 1982, la colonie de manchots royaux qui l’occupait avait été estimée à 500 000 couples, soit un million et demi d’individus avec les poussins, or, une trouée météo avait permis, en 2016, de prendre des photos d’hélicoptère : on constatait ainsi la diminution de la population à environ 60 000 couples.

C’était l’objet principal de la mission amenée par le Marion-Dufresne en 2019 sur l’île aux Cochons. Prises de sang, prélèvements salivaires, sur les manchots, les albatros hurleurs et les pétrels géants, pose de balises satellites, excavations de « carottes » de tourbe…tout cela vivement, malgré le vent et la pluie, en respectant le « zéro trace humaine » à laisser sur place par les scientifiques, sous le carnet de notes de Michel Izard et l’objectif de Bertrand Lachat.

Il faut louer la forme de cet ouvrage qui saute alternativement du présent à l’époque de la découverte, en 1772, par Marion-Dufresne, sur la flûte Le Mascarin  et par son second, Julien Crozet, dont les qualités d’explorateur furent reconnues par le grand James Cook lui-même, aux quelque cent ans allant du début du XIX° siècle aux premières années du XX°, périodes de chasse au phoque et d’exploitation de l’huile d’éléphant de mer.

Les « phoquiers » se cachaient mutuellement les coordonnées d’un île où ils passaient des mois, voire des années, lorsque le vaisseau qui devait les rechercher avait fait naufrage. Des naufragés y trouvaient parfois un abri temporaire ou disparaissaient, ignorant que les secours les avaient enfin repérés. Les bouilleurs de graisse d’éléphant de mer abandonnaient leurs grandes cuves de fonte dont le combustible était souvent constitué de manchots royaux et dont certaines se trouvent encore sur l’île. Ce furent eux qui, important des cochons du Cap, essayèrent sans trop de succès de varier les menus des forçats du phoque ou de l’huile.  Peut-être en reste-t-il quelques-uns sur l’île qui porte désormais leur nom, comme il reste des chats et des souris (pour les nourrir ?) apportés sciemment ou non par les marins.

On ne dévoilera pas les prémices de solution du mystère dont les recherches se poursuivent à travers les laboratoires spécialisés mais, une note d’optimisme a été apportée par la Marine nationale, dont la frégate Nivôse  permit un comptage aérien en févier 2020, dévoilant une forte reprise (plus de 20%) de la population des manchots royaux. L’espoir peut donc renaître, en dépit des changements climatiques.

Un livre qui se lit vraiment comme un roman !

CF(H) Jean-Marie CHOFFEL
25/06/2022

Le mystère de l’île aux cochons
Michel IZARD
Paulsen

Voir également la recension du CV(H) Philippe HENRAT et du CV(H) Jean FOSSATI

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