Tout l’or des braves

Lorsque l’on évoque les histoires de pirates, ressurgissent les souvenirs adolescents de lectures nocturnes à la lampe de poche pour terminer au plus tôt un roman passionnant, caché sous les couvertures pour prévenir les foudres parentales. Il y avait des tempêtes, des batailles navales, des abordages, des mutineries, des héros au grand cœur et des brutes abjectes. Tout l’or des braves ne déroge pas aux règles du genre. Il peut donc parfaitement figurer dans le rayon jeunesse de toute bonne librairie. Et ne boudons pas notre plaisir à dévorer un roman du rayon jeunesse.

Cependant, Tout l’or des braves se prête à bien d’autres niveaux de lecture, fort inspirants.

Tout d’abord, et cela n’avait jamais été très explicite dans les romans de pirates classiques, l’organisation pirate nous est dévoilée dans tous ses détails prosaïques : investisseurs finançant le projet, recrutement des Frères qui constitueront la Compagnie, élaboration par ceux-ci d’un accord appelé chasse-partie – sorte de constitution réglant tous les aspects du commandement, du pouvoir cogestionnaire des pirates et du partage du butin. Cette plongée dans l’économie d’un projet pirate est passionnante et peut, sans nul doute, éclairer le fonctionnement de la piraterie contemporaine.

Ensuite, et c’est sans doute là le plus passionnant, le roman décrit l’évolution du mode de gouvernance de la Compagnie des pirates, en fonction des évènements (décès du Capitaine, mutinerie, conflits interpersonnels), de la version en cours du chasse-partie et de son évolution à la suite des soubresauts du récit. La preuve est ainsi faite qu’une gouvernance stable ne peut être basée que sur une constitution juridique solide. L’actualité internationale récente nous a offert des aperçus inédits sur les dérives qui peuvent tenter certains dirigeants. Leur mise en parallèle avec quelques épisodes de Tout l’or des braves est plus que réjouissante pour l’esprit.

Enfin, un dernier niveau de lecture donne à méditer : le type de commandement. Le contraste est saisissant entre le Capitaine tout puissant car efficace et accepté, son remplaçant qui veut être aimé des matelots, en vient à ne plus rien commander et finit assassiné, et le despote brutal qui, pour conserver son pouvoir, supprime tous les membres d’équipage ayant une certaine compétence – avec les funestes conséquences que cela entraine.

Clifford Jackman, est un Canadien anglophone et Tout l’or des braves est son deuxième ouvrage. Dans son premier livre, La Famille Winter, il avait exploré le banditisme du Far West au XIXème siècle. Espérons qu’il nous offrira bientôt d’autres œuvres inspirées par la mer et les marins. Il est à noter que les éditions Paulsen se sont méritoirement attachées à ce que les termes de marine du XVIIIème siècle soient traduits le plus précisément possible, ce qui contribue à l’agrément de la lecture de ce volume qui marque durablement son lecteur.

LV(H) Dominique RENIE
06/02/2021

Tout l’or des braves
Clifford JACKMAN
Paulsen

Voir également la recension de CF(H) Alain M. BRIERE et la recension du LV(H) Bruno LEUBA

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