Chebec

Impressionnant ! Il n’y pas d’autre terme pour désigner ce livre ! Des romans maritimes, nous en avons lu un grand nombre – certains bons, d’autres moins ‒, mais jamais aucun comportant in fine une bibliographie de SOIXANTE-CINQ titres ! Et que de plumes illustres ! François Bellec, Jean Boudriot, Fernand Braudel, Christian Buchet, Gilbert Buti, Philippe Haudrère, Jean Meyer, Étienne Taillemite, et, bien sûr, les « généraux des galères » Marc Vigié et André Zysberg ! De surcroît, l’auteur n’a pas hésité à parsemer son texte de notes de bas de page (généralement fort pertinentes), ce que n’osent même plus faire les historiens de profession. Bref, cet ouvrage sort vraiment du commun.

 L’intrigue est solide et pourrait être la transcription romancée d’un journal inédit (comme nous l’avons, un instant, soupçonné). C’est l’histoire de Guilhem Roques, originaire de Sérignan (Hérault), qui, par une nuit funeste de septembre 1680, est enlevé à son village au cours d’un de ces raids que les pirates algériens pratiquaient alors couramment sur les côtes de France, d’Espagne et d’Italie et qu’ils semblent aujourd’hui avoir totalement oubliés. Plusieurs de ses concitoyens, l’accompagnent malgré eux dans sa tragique aventure. Au cours des trois années qui suivent, ce jeune homme courageux, intelligent et instruit va conquérir l’estime, voire l’affection du terrible raïs Aslan (renégat d’origine grecque) qui l’a capturé : intendant de son domaine, puis écrivain embarqué,  officier et enfin capitaine de son chébec, ce qui lui permettra à la fin de fuir Alger en échappant de justesse aux bombes de la flotte d’Abraham Duquesne et de se réfugier à Livourne avec des volontaires de son équipage, leurs familles et des captifs rachetés par ses soins.

 La vie à Alger à cette époque, le sort cruel des esclaves chrétiens, le rôle joué dans l’activité commerciale de la Régence par les renégats, les Israélites et la ville de Livourne, les missions de rachat entreprises par les religieux trinitaires ou mercédaires, enfin les relations pour le moins houleuses entre les Algériens et la France de Louis XIV sont décrits avec une exactitude historique rigoureuse (il ne serait pas surprenant que l’auteur ait subrepticement consulté les riches archives du consulat de France à Alger et celles de la Marine).

 Certains passages pourront être jugés un peu scabreux, mais, après tout, c’est l’Histoire, et il est douteux que les pirates barbaresques (et les autres aussi, du reste) aient ressemblé à Errol Flynn ou même à Johnny Depp. Ce qui est également remarquable, c’est que l’auteur nous conte les tribulations de son héros, en elles-mêmes mouvementées et captivantes à souhait, sans chercher à y rajouter pour le plaisir des épisodes héroïques qui sembleraient artificiels. On peut même remarquer que le roman s’achève de manière quelque peu abrupte (mais peut-être cela annonce-t-il une suite).

Il s’agit donc là d’un ouvrage d’exception, aussi passionnant que solidement documenté.

CV(H) Philippe HENRAT
09/04/2019

Chebec
Olivier d’ORBCASTEL
Éditions Erick Bonnier

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