Equatoria

C’est le second album de Corto Maltese conçu par ce tandem espagnol et dont le grand mérite est de ne pas tomber dans le piège de ‘à la manière de’ mais de néanmoins respecter les canons définis par Hugo Pratt. Après Le Soleil de Minuit, ils confirment leur maitrise à recréer le personnage de cet aventurier, fils d’une gitane andalouse et d’un marin de la Royal Navy, qui trimballe sa fine silhouette et son inépuisable mélancolie dans le monde troublé du début du XXème siècle.

Les aventures de Corto Maltese ne se racontent pas tant la fiction se mêle à la réalité, tant les intrigues se nouent et se dénouent comme un serpent de mer et tant les personnages se croisent, s’aiment et se haïssent et par forcément dans cet ordre. A tout le mieux, ces aventures s’esquissent, en suggérant quelques pistes, en déflorant du bout des lèvres quelques énigmes, et surtout en suscitant l’envie du lecteur d’aller plus loin dans la vision désinvolte et tragique de l’humanité, fil rouge indélébile tissé par Hugo Pratt.

Equatoria c’est un petit territoire oublié au sud du Soudan actuel, province ottomane en 1911, rattaché à l’Egypte, elle-même sous la tutelle britannique. Bel imbroglio territorial qui alimente toutes les convoitises et préfigure le Grand Jeu où se croiseront entre autres, Churchill, Henry de Monfreid, Hamed Ben Mohamed El Marjebi dit Tippo Tip, Ferida Schnitzer, fille métisse du Bey d’Equatoria, Aïda, inspirée d’Ida Treat, journaliste née aux Etats-Unis et qui épousera le communiste Paul Vaillant Couturier, Afra, esclave à la recherche de son identité… et Corto Maltese en quête du miroir du prêtre Jean, mystérieux objet ramené des croisades.

Depuis son premier récit La Ballade de la Mer salée, il y a cinquante ans, Hugo Pratt est un observateur avisé du monde qui change, ce vieux monde des explorateurs et des colons qui s’effondre sous les coups répétés du progrès et que parcourt en philosophe Corto Maltese. Les nouveaux auteurs emboîtent le pas, avec leur propre sensibilité et un ton juste. Sœur Lise qui accompagne Aïda dans son périple à la rencontre d’Henry de Monfreid, a des initiatives humanistes, Afra prône les droits de l’homme, Tippo Tip se repent de son passé dans la traite arabo-swahilie et Corto Maltese, tel qu’en lui-même, promène sa désinvolture avec une suprême élégance…

L’édition en noir et blanc, est préfacée par Benoit Mouchard, directeur éditorial de Casterman, François Busnel qui anime La Grande Librairie sur France 5 et Juan Diaz Canales qui s’essaie à décrypter les femmes de cette histoire, avec de sublimes dessins de son acolyte Rubén Pellejero.

 

CV(H) Alain M. BRIERE
04/11/2017

 

Corto Maltese – Tome 14 – Equatoria
Edition en noir et blanc
Juan Diaz Canales (scenario) – Rubén Pellejero (dessins)
Traduit de l’espagnol par Anne Marie Ruiz
Casterman

 

Voir aussi la recension du CC(R) Jean-Pascal DANNAUD

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