Le Bateau-usine

couverturelebateauusineMilieu des années 1920. En mer d’Okhotsk, non loin des eaux territoriales soviétiques, le Hakkô-Maru, bateau-usine entre en campagne de pêche au crabe, sous la protection d’un destroyer de l’Empire du Soleil Levant. L’équipage, composé de saisonniers venus d’horizon divers – mineurs, pêcheurs, étudiants -, ne se doute pas du destin qui l’attend. Battue par les vents glacés venus de Sibérie, cette mer septentrionale s’avère périlleuse pour le piteux navire et ses hommes. Mais cela n’est rien au regard des conditions de vie auxquelles le brutal intendant Asakawa les soumet. Entassés dans des locaux insalubres, rongés par la vermine, affamés et harassés de fatigue, les marins et ouvriers sont soumis aux cadences infernales et à des châtiments barbares. Devant tant d’injustice, la rébellion gronde…

Le Bateau-usine, publié en 1929 est un récit inspiré de faits réels ayant défrayé la chronique en 1926. Son auteur, Tajiki Kobayashi, mena une enquête approfondie sur les bateaux-usines et les exactions qui survenaient alors à leur bord, et rédigea un roman qui, s’il fut censuré maintes fois (le régime impérial craignait la contagion bolchevique ; l’auteur mourut d’ailleurs précocement, en 1933, sous les coups de la police politique), est considéré aujourd’hui comme un chef d’œuvre de la littérature prolétarienne et contestataire japonaise.

Ce manga, réalisé par Gô Fujio en 2006 et traduit cette année en français, en est une adaptation qui rend bien la dureté de la vie à bord, la prise de conscience collective et la mise en place des mécanismes de révolte face à l’injustice d’un capitalisme sans règles ni limites. On pourra trouver l’expressivité des personnages exacerbée – c’est souvent le propre du genre -, mais il faut surtout relever le face à face entre la figure de l’intendant, sorte d’archétype capitaliste, et les caractères presque anonymes de l’équipage en lutte. Le dessin, par son découpage cinématographique et le recours au seul noir et blanc, accentue la dimension dramatique du récit.

Le Bateau-usine n’est pas à proprement parler un roman maritime, mais une histoire qui a la mer pour décor et pour thème la violence et l’oppression. Son caractère marin est toutefois indéniable : il montre bien la dureté de la pêche et de la navigation sur un bateau bon pour être réformé, les risques du travail sur le pont balayé par les lames, et la vie grouillante des crabes du Kamtchatka répandus au sortir des filets…

Une découverte digne d’intérêt.

CC(R) Jean-Pascal DANNAUD
28/11/2016

Gô Fujio et Tajiki Kobayashi
Le Bateau-usine
Editions Akata – août 2016

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