Le Port des Marins Perdus

Couverture Le Port des Marins PerdusJuillet 1807. Un jeune garçon est découvert inconscient sur une plage du Siam par un officier de la Royal Navy. Abel, qui ne se souvient que de son prénom, se lie d’amitié avec son sauveur, qui assure provisoirement le commandement du HMS Explorer suite à la trahison et la disparition du commandant Stevenson. Enrôlé comme mousse, il fait preuve à bord de troublantes aptitudes : il sait lire et jouer du violon. Il semble surtout doté d’un sens inné de la navigation. Qui est donc cet adolescent qui fascine et effraie l’équipage ? Rentré à Plymouth, il est logé chez les trois sœurs Stevenson, Helen, Heather et Harriet, qui l’accueillent à bras ouverts dans leur auberge, où nul ne vient plus depuis que la forfaiture de leur père est connue, et ne tardent pas à le considérer comme un frère. Il fait également la connaissance de Rebecca Riordan, l’étourdissante tenancière du Pillar to Post, maison close en vue, qui l’initie… à la poésie. Alors que la mémoire lui revient peu à peu et qu’il se découvre une foule de points communs avec le commandant Stevenson, Rebecca est la seule à saisir son secret. Elle pourrait même détenir la clé de son amnésie, d’autant qu’elle est la seule, avec lui, à apercevoir au large de Plymouth une ile invisible au commun des mortels : le port des marins perdus…

Le Port des Marins Perdus est un récit d’aventures où se mêlent les embruns de la haute mer, l’exotisme des antipodes et les ambiances – entre presse et coupe-gorge – des ports anglais du début du 19ème siècle. C’est aussi un conte fantastique, une fable énigmatique ancrée dans l’imaginaire romantique britannique : d’amples extraits de Wordsworth, Blake et Coleridge – tous contemporains de l’histoire – s’y mêlent au point d’en devenir une substance de la narration. Le scénario regroupe tous les composants d’une bonne histoire : action, suspense, amour, générosité, trahisons et introspection, le tout parfaitement dosé. Les 320 pages de cette intrigue permettent le plein déploiement des personnages, auxquels on ne peut que s’attacher.

La force du récit est soutenue par le découpage qui assure une grande lisibilité. Les dessins crayonnés sont d’un extraordinaire dynamisme et rendent avec justesse les expressions des protagonistes – un brin dysnéen dans leur façon – sans que l’absence d’encrage ou de couleur ne dérange ; tout au plus quelques cases auraient mérité plus de contraste.

Le Port des Marins Perdus, créé par un couple d’italiens, Teresa Radice (au scénario) et Stefano Turconi (au dessin), est un ouvrage de haute facture qu’on ne lâche pas avant d’en connaître la fin et que l’on relit plusieurs fois tant il est riche et original. Il est rare qu’un roman graphique possède autant de qualités. Littéraires bien sûr, avec pour poutre maîtresse The Rime of the Ancient Mariner de Samuel Coleridge et pour membrures des airs de Robert Louis Stevenson et de Jane Austen. Musicales aussi, tant les chants de marins balisent cette histoire de leurs mélodies. Visuelles enfin, pour une bande dessinée que l’on verrait aisément portée à l’écran.

Amateurs de romans maritimes, vous tenez là une œuvre forte, envoutante et ambitieuse, qui a déjà valu à ses auteurs le prix Gran Guinigi du meilleur roman graphique au festival de Lucca en 2015. Elle en mérite d’autres. Ne la ratez pas !

CC(R) Jean-Pascal DANNAUD
12/08/2016

Teresa Radice et Stefano Turconi
Le Port des Marins Perdus
Glénat – treize étrange – juin 2016

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