La Chine et la Mer

PMO_LaChineEtLaMerVoici vingt ans que la Chine comble son retard sur le monde industrialisé. Marchant sur les traces des Allemands à la fin du XIXe siècle, des Américains au début du XXe siècle et des Japonais après la Seconde Guerre mondiale, la Chine monte en puissance. Elle se dote des attributs d’une grande nation y compris le développement d’un outil maritime tant militaire que marchand, aux antipodes de sa tradition séculaire et terrienne d’Empire du Milieu.

Les 18 co-auteurs de cet ouvrage traitent, chacun sous un angle différent, économique, stratégique, énergétique, politique, etc. de l’évolution de la conception maritime chinoise.

Depuis le périple sans suite de l’amiral Zheng He à travers l’océan Indien au début du XVe siècle, la Chine n’éprouvait pas d’attrait particulier pour les choses de la mer, bien qu’elle eût toujours commercé avec les pays voisins et notamment avec la Péninsule indochinoise.

Après avoir été considérée par les Américains comme une force supplétive de Moscou, la Chine à la fin des années cinquante commence à être perçue par Washington comme une puissance régionale dont l’expansion menaçait de déstabiliser l’équilibre géopolitique de sa frontière pacifique. La défense de Formose et de ses intérêts marque la volonté d’empêcher l’essor d’une puissance qui ne se contentait plus d’être continentale, mais avait des ambitions maritimes. En 1959, Mao Zedong affirmait : « Même si nous devons y consacrer 10.000 ans, nous devons avoir notre propre sous-marin nucléaire ». Il ne faudra pas attendre autant : le premier sous-marin nucléaire d’attaque chinois a été mis en service en août 1974 !

La Chine s’est rendu compte que, pour protéger son intégrité territoriale maritime, maintenir ses droits et intérêts souverains sur son espace maritime et ses zones économiques exclusives de 200 nautiques, elle devait très vite construire une marine adaptée à ces impératifs. Entretemps, elle ne cesse d’affirmer son autorité sur les archipels avoisinants : Xisha (Paracels), Nansha, Diaoyudao et tout récemment Diaoyu (Senkaku) revendiqué par le Japon et Taïwan. Cet intérêt pour des îlots inoccupés pour la plupart sent indéniablement la propagande domestique, mais aussi le gaz et le pétrole, car cet espace maritime est réputé contenir d’importants champs pétrolifères et gaziers. Depuis qu’elle a adhéré à l’OMC en 2001 la Chine a pris le deuxième rang dans le commerce mondial et développé sa marine marchande en conséquence. Cette dernière est essentielle, tant la Chine devient importatrice de matières premières et notamment de pétrole et de charbon, bien qu’elle en soit productrice et, il y a peu, à un niveau d’autosuffisance.

Le Pacifique est à l’évidence une zone stratégique de première importance tant pour les Etats-Unis que pour la Chine et sans doute également pour le monde entier. Pragmatique, Washington entend développer la coopération avec Beijing pour mieux « encadrer » sa montée en puissance. On peut se demander si cette compétition feutrée ne va pas déboucher sur une course aux armements…

Cette série d’articles clairs et bien documentés, contribue utilement à notre prise de conscience que le sort du monde ne se joue plus en Europe mais bel et bien en Asie orientale et du Sud-Est. Souhaitons que cet avenir ne soit pas belliqueux et que le trublion de Corée du Nord ne vienne pas rompre le nouvel et fragile équilibre instauré entre les deux grandes puissances du jour.

CF (R) Alain M. Brière

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Au premier abord, pour l’avoir feuilleté distraitement, l’ouvrage m’est apparu indigeste, avec de trop nombreuses pages où les notes occupent plus du tiers de la page, quand ce n’est pas une bonne moitié, signe révélateur d’une coquetterie académique des plus complaisantes qui ne conforte guère que son auteur.
Toutefois, une fois l’effort accompli d’aller y regarder de plus près, mon jugement se révèle moins définitif. L’ouvrage est conceptuellement bien structuré en trois parties distinctes d’importance à peu près égale, traitant d’abord des héritages, puis des nouveaux enjeux, pour focaliser enfin sur les lieux de tensions.
Toutefois, le discours se trouve souvent gâté par des répétitions, soit dans une même contribution, soit entre contributions voisines. Que dire aussi des cartes qui, outre d’être rarement celles rappelées dans le texte, sont toutes inexploitables? De véritables « plats de nouilles », ou sinon de savants nuages de grisés dégradés… Les tableaux sont à l’avenant, sans grande signification intrinsèque ni même nécessité de les avoir produits (?).
S’il me fallait décerner une palme aux moins indigestes des contributeurs, elle irait sans doute à Alexandre Sheldon-Duplaix (transferts de technologies dans le développement de la marine chinoise), voire à l’amiral Oudot de Dainville (vu de Paris: les contraintes de l’ascension pacifique).
A contrario, celle de la complaisance déjà relevée plus haut reviendrait conjointement à Hervé L’Huillier qui termine la dernière phrase de son approche – de surcroît truffée de franglais : vers un ”hub” énergétique? – avec Aristote et un mot qu’il orthographie en grec, la f???a (p. 111), ainsi qu’à Christopher E. Goscha et Nguyen Thi Hanh qui, tous deux, assortissent leurs notes respectives de références données en vietnamien…
Enfin, reproche dirimant (et non des moindres), l’ouvrage est globalement très inégal. Réparti entre des contributeurs qui traitent d’une actualité déjà vieillissante, il est en fait le résultat prévisible d’une juxtaposition de textes conduite sans précaution aucune.
Dire que je n’ai pas du tout apprécié est un euphémisme.

CV (H) Jean-Paul Grillet

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