Les Beck, Armateurs de Dunkerque

À l’issue d’une prestigieuse carrière au sein de la Marine, l’amiral Chomel de Jarnieu s’est tourné vers l’historiographie où son coup d’essai fut un coup de maître : les historiens de la Marine ne risquent pas d’oublier la magistrale biographie de son arrière-grand-père, le génial et pittoresque amiral René Daveluy, publiée en 2014.

Aujourd’hui, il récidive en nous retraçant la saga d’une famille d’armateurs dunkerquois, les Beck, auxquels il est apparenté du côté maternel. Cet ouvrage sympathique et sans prétention ne manque pas d’intérêt. En effet, s’il est facile de consulter les archives, soigneusement conservées et classées, de la Compagnie Générale Transatlantique, des Messageries Maritimes ou des Chargeurs Réunis, il n’en est pas de même pour les petites compagnies d’armement, si nombreuses et souvent si dynamiques, qui jouèrent un rôle important, voire déterminant, dans le développement de l’économie des ports de commerce français au cours du 19e siècle, mais dont, trop souvent, les archives ont été perdues ou détruites.

     L’amiral n’a pas ménagé sa peine pour retracer, au prix de recherches dont il évoque la longueur et la difficulté dans les archives publiques, les papiers de famille, les articles de presse ou les études locales, l’histoire et l’activité de cette famille Beck qui, de 1823 à 1929, figura parmi les plus importantes dynasties d’armateurs de Dunkerque. C’est ainsi que se comptèrent par dizaines les bâtiments de cette compagnie, depuis la Petite Fortune, corvette de 35 tonneaux acquise en 1824, jusqu’au trois-mâts de 800 tonneaux le Napoléon III, que le journal local définit, lors de son lancement en 1866, comme « le plus grand navire de commerce construit jusqu‘à présent à Dunkerque », en passant, bien sûr, par les célèbres goélettes qui pratiquaient dans les conditions les plus extrêmes cette pêche morutière « à » Islande que l’amiral nous décrit en détail. Quant aux autres navires de l’armement Beck, ils pratiquaient le cabotage, mais aussi le trafic au long cours qui les entraînait parfois jusqu’en Extrême-Orient, avec des cargaisons aussi variées que les céréales, le charbon, le guano, le lin et le chanvre, voire des immigrants indiens transportés aux Antilles pour y pallier le manque de main-d’œuvre.

     Enrichis par leur dynamisme, les membres de la famille Beck surent faire profiter leurs concitoyens de leur bonne fortune. C’est ainsi que Gabriel Beck fonda et présida durant de longues années la Caisse de secours aux familles des marins péris en Islande et s’impliqua dans la régulation de la pêche au sein de la chambre de commerce de Dunkerque, dont son fils, Georges Beck, présida de 1926 à 1929 la commission financière. Mentionnons aussi la somptueuse collection de porcelaines et d’ivoires chinois que les Beck, gens de goût, avaient réunie et qui fut léguée en 1911 au Musée des Beaux-Arts de Dunkerque par Hortense Angellier-Beck.

     Il convient d’insister sur la qualité des nombreuses photographies qui parsèment l’ouvrage, certaines très émouvantes comme ces dalles de pierre tapissant le fond de la petite rivière qui serpente au cœur du « village français » en Islande et dont chacune porte en lettres d’or le nom d’un marin disparu, et d’autres très rares (tel le cliché unique de l’atelier de « repacquage » de la famille Beck).

Le livre, dans son ensemble, mérite très largement d’être lu.

CV(H) Philippe HENRAT
21/12/2020

Les Beck, Armateurs de Dunkerque
Amiral Benoît CHOMEL de JARNIEU
Publication de l’auteur
Toulon, Imprimerie Repro Systèmes 83

Voir également la recension du CV(H) Marc LEVATOIS

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