Les naufragés du Wager
- Auteur CF(H) Philippe BEAUCHESNE
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The Wager, a tale of shipwreck, mutiny and murder est le titre original de ce récit traduit en français ; il exprime bien le thème de la narration de cette tragédie maritime et humaine. Le Wager, doté d’un équipage, en grande partie contraint, d’environ 250 personnes, était un navire de la Royal Navy inclus dans une escadre britannique ayant mission de doubler le cap Horn et de s’emparer des richesses des Espagnols en détruisant leur flotte. Malheureusement, après une traversée déjà très éprouvantee de l’Atlantique, le Wager, pris dans une forte tempête, avec un équipage fort amoindri par la brutalité du commandement, le typhus et le scorbut, fit naufrage en mai 1741 au large des côtes chiliennes et s’échoua sur une ile déserte, baptisée ensuite île Wager. L’équipage rendit le capitaine David Cheap et son second coupables par aveuglement de l’échouement. Les conditions des 145 survivants sur cet ilot furent effroyables. En loques ou quasi nus, ils y subirent le froid et la faim sous une tempête quasi permanente, dans le plus grand dénuement et un immense désordre entretenu par une faction rebelle conduite par le maître d’équipage. Le capitaine, qui perdit son sang-froid en tuant un agité, avait le projet d’utiliser un canot pour gagner au nord l’île Chiloé, tandis que le chef canonnier John Bulkeley prit la décision de passer par le détroit de Magellan avec une barge. Ce leader naturel bon navigateur, bien que non officier, réussit à gagner le Brésil puis fut rapatrié en Angleterre en janvier 1742 avec une trentaine de survivants. Le capitaine avec quelques officiers, dont le jeune John Byron grand-père du poète, parvint à gagner le Chili grâce à des indigènes patagoniens, en partie avec leurs canoés et partiellement à pied. Après ces douloureux calvaires et un retour à Portsmouth, Cheap accusé de meurtre demanda que Bulkeley et ses compagnons soient pendus pour mutinerie. Dans un contexte de polémiques contradictoires, la cour martiale n’y donna pas suite, pour éviter de nuire à la réputation de la Navy, après avoir consulté un livre de bord tenu par Bulkeley, et avoir entendu son récit détaillé ainsi que le témoignage de tous les survivants. Le lecteur est saisi par l’intensité de cette atroce aventure, où se sont révélés les pires instincts sordides, jusqu’au cannibalisme et au meurtre. Cet épisode historique a fait l’objet de cinq années de recherches avant que l’auteur souligne ainsi avec précision et lyrisme toute l’horreur de la vie des marins au dix-huitième siècle, leurs souffrances inouïes dans des conditions sanitaires infectes, pour servir une volonté étatique de piller les richesses du monde et d’asservir les peuples autochtones. Ce témoignage très documenté constitue un chef d’œuvre littéraire et nautique, par les magnifiques descriptions des manœuvres en mer et de la cruauté humaine.
CF(H) Philippe BEAUCHESNE
23/06/2025
Les naufragés du WAGER
David Grann
Editions du sous-sol
Voir également la recension de Antonio Ferrandiz
Voir la recension de l’ouvrage en version originale, par le LV(H) Dominique RENIE